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    Monsieur Coquille, de Rodolphe Bringer

    • Photo du rédacteur: Lucienne
      Lucienne
    • il y a 14 heures
    • 11 min de lecture
    Cette adorable nouvelle policière est parue dans le magazine Je sais tout du 15 janvier 1914.

    Texte dans le domaine public, illustration couleur sous licence CC-BY-NC, dessins noir et blanc de Ch. Laborde

    Histoires de chats par Ribet


    La porte de son petit salon soigneusement fermée à deux tours de clef, tandis que sa vieille bonne était descendue pour vider sa boite aux ordures, un à un, d’une main délicate, M. Coquille extrayait les morceaux de sucre d’un sucrier de cristal, et méthodiquement les déposait sur la table en comptant :

    « Quatorze, quinze, seize, dix-sept et dix-huit !... Pas un de plus, pas un de moins !... »

    Confortablement assis en face de lui, une cigarette aux lèvres, son ami Larve le regardait faire, ébahi, et la stupéfaction se lisait dans son clair regard de sous-chef de la comptabilité à la Mairie du XVIIème arrondissement.


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    Cependant, M. Coquille demandait à son ami :

    « Combien en as-tu mis dans ton café ?

    — De quoi ?

    — De sucre, animal !

    L’autre sursauta :

    — Eh bien... Mais pas un seul morceau... Tu sais bien que depuis l’Exposition de 89...

    Et il allait se perdre dans une histoire explicative. Mais. M. Coquille avait bien le temps d’écouter des histoires explicatives. À haute voix, il déduisait :

    « Quatre dans mon chocolat, trois dans le café au lait de Gudule, deux dans mon café de midi et deux ce soir, cela fait onze ou le cric me croque, Et onze retranchés de trente cela fait dix-neuf ! Or, il n’en reste que dix-huit ! Comprends-tu cela, Larve, toi qui es dans la comptabilité ?

    Larve commençait à comprendre, et, hautement, il exprima cette pensée :

    — Tu en es à chicaner sur les morceaux de sucre, à cette heure ?

    — Je ne chicane sur rien du tout ! Je constate. Si encore c’était la première fois ! Mais écoute, Larve, mon ami, depuis trois mois, chaque soir il me manque un morceau de sucre ! Je suis au-dessus d’un morceau de sucre ! Mais cela m’obsède, Pourquoi tous les soirs me manque-t-il un morceau de sucre ?

    — Hé ! Je me moque pas mal de ton morceau de sucre ! s’exclama l’ami Larve. Si tu crois que je suis venu, ce soir, dîner avec toi pour que tu me parles de tes morceaux de sucre !

    — Larve, mon ami, continua M. Coquille, tu ne sais pas tout !

    — Hé! Je sais que ta bonne te vole. Cela me suffit.

    — Larve, tu m’affliges ! Gudule ne me vole pas ! Gudule est au-dessus de tout soupçon ! Ignores-tu que Gudule est à mon service depuis plus de trente ans, et que le prix Montyon la guette ?

    — En voilà une raison !


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    — Écoute, Larve, mon ami, il y a une dizaine d’années, Gudule a trouvé dans la rue un porte-monnaie contenant huit mille trois cent soixante et quinze francs et des centimes. Sais-tu ce qu’elle a fait, Gudule ?

    — Elle a acheté de la rente !

    — Elle a porté ce porte-monnaie chez le commissaire de police et le propriétaire lui a donné cinquante centimes pour sa probité !

    — Cela lui a servi de leçon, et, depuis, elle fait danser et caracoler l’anse de son panier aux provisions !

    — Gudule est une honnête fille, qui, pour payer les merlans cinq centimes meilleur marché, s’en va jusqu’à la Villette !


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    — Hé ! Tu m’ennuies, avec ta Gudule, s’exaspéra Larve. Épouse-la et qu’il n’en soit plus question ! Il n’en reste pas moins qu’elle te vole ton sucre !

    —Je n’y puis croire... Et pourtant, l’évidence !… Écoute, Larve, je vais te dire une chose : j’ai essayé plusieurs fois de ne mettre dans le sucrier que les onze morceaux nécessaires à notre quotidienne consommation, sais-tu ce qui est arrivé, Larve ?

    — Le lendemain, il n’y avait plus que dix morceaux, et c’est toi qui n’en a mis qu’un dans ton café du soir.

    — Larve, tu erres étrangement. Il y avait les onze morceaux, mais le lendemain, il en manquait deux... deux... tu m’entends ?

    — À ta place je ne me ferais pas tant de mauvais sang. Je me dirais simplement : Gudule me coûte quarante-cinq francs par mois, plus trois cent soixante-cinq morceaux de sucre par an ! À seize sous le kilo, ça ne fait pas une somme !

    — Larve, mon ami Larve, tu es un crétin ! Je n’en suis pas à un morceau de sucre près, je le répète ! J’ai en Gudule une entière confiance ! Elle a les clefs de toutes les armoires ! Pourquoi, chaque jour, me volerait-elle un morceau de sucre ? Pourquoi ?

    — Est-ce que je sais, moi ? Demande-le-lui !

    — Écoute, Larve, tu le sais, je n’ai peur de rien. Mais l’inconnu me fait frémir.… Il se passe autour de moi quelque chose d’anormal, et... et... j’ai peur !

    — Coquille, mon ami Coquille, sais-tu de quoi tu me fais l’effet ?

    — Dis toujours.

    — D’un gâteux ! »

    Cette conversation avait lieu un soir de septembre, dans un petit appartement de la rue Darcet, entre M. Larve, sous-chef de la comptabilité à la mairie du dix-septième et M. Coquille, chef en retraite du bureau des décès de la même mairie. C’était un appartement fort simple, dont le loyer, assurément, ne devait pas dépasser huit cents francs. Il se composait d’une cuisine, domaine de la dite Gudule, d’une salle à manger où il eût été difficile de donner un dîner de plus de quatre couverts, d’un salon où six personnes se fussent trouvées à l’étroit et de la chambre de M. Coquille ; Gudule couchait au sixième. Il était, cet appartement, solidement meublé d’acajou, car le mobilier avait appartenu au moins à trois générations successives de Coquille, et c’était ce qui s’était fait de mieux sous le règne du bon Louis-Philippe, monarque ami de la presse et des parapluies.


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    Le salon de M. Coquille était meublé d’un guéridon surchargé d’albums de familiales photographies ; d’une console où s’érigeait orgueilleusement une cave à liqueurs en bois des îles ; de quatre fauteuils et de six chaises en tapisserie. Il y avait encore une carpette qui ne sortait d’aucune savonnerie, des rideaux de cretonne à fleurs jaunes, une cheminée avec pendule à sujet et candélabres du même simili-bronze et des estampes montrant, dans leur cadre dédoré, le Prisonnier aux Hirondelles, la Mort de Marie-Stuart et autres sujets aussi joyeux. Tel qu’il était, ce salon faisait l’orgueil de M. Coquille, et la fruitière de la rue Caroline comme l’herboriste de la rue des Dames, qui l’avaient entrevu, en avaient immédiatement diagnostiqué que M. Coquille était un homme comme il faut et des plus conséquents.


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    Mais, ce soir-là, M. Coquille avait bien d’autres soucis que de s’enorgueillir de son salon aux tentures jonquilles. Il manquait un morceau de sucre à M. Coquille, et cela suffisait à empoisonner sa vie et à lui faire paraitre fades guéridon, console, boîte à cigares jouant l’air de la reine Hortense et albums de photographies où l’on voyait des dames en crinoline et des messieurs en garde national.

    En cette époque lointaine, M. Coquille, petit expéditionnaire à la Préfecture de la Seine, avait eu la douleur de voir mourir sa mère, et, fils unique, avait hérité d’elle. Et, pas plus qu’il n’avait voulu se séparer du guéridon, de la console, de la cave à liqueurs en bois des îles et du porte-cigares joueur de la reine Hortense, en bois de citronnier, il n’avait voulu abandonner Gudule qui, au même titre que ces meubles désuets, faisait partie de la maison. Gudule avait vingt-cinq ans alors, et depuis dix ans, avait mis son dévouement au service de cette pauvre Mme Coquille, la mère. Elle avait presque élevé Coquille Johanès. Déjà, elle était presque aussi laide qu’elle l’était à cette heure, mais son dévouement était sans bornes, et, tyrannique pour son maître comme le sont toujours les vieux et fidèles serviteurs, elle se serait fait hacher menu comme chair à pâté, pour lui être agréable.

    Et c’est cette vieille femme que Coquille accuserait de lui dérober chaque matin un morceau de sucre ? Non ! Ce n’était pas possible ! Et pourtant, que faire contre l’évidence ? Il n’en demeurait pas moins que, chaque soir, un morceau de sucre manquait dans le sucrier.

    « À ta place, dit M. Larve pour en finir, j’irais consulter le commissaire de police du quartier !

    — À quoi bon ?... La police est si mal faite !...

    — Alors, fais une enquête toi-même...

    M. Coquille demeura une minute rêveur.

    — Pourquoi pas ?... décida-t-il enfin.

    — En tous cas, reprit M. Larve, comme tu n’es pas drôle, depuis qu’on te vole ton sucre, tu ne trouveras pas mauvais que je ne revienne plus tant que tu n’auras pas éclairci ce mystère...

    — N’est-ce pas, que c’en est un ? Et angoissant...

    — J’ai mes petites habitudes, continua l’autre, égoïste, et je ne voudrais rien y changer ! Tu m’embêtes, avec ton sucre, aussi bonsoir !

    — Sûrement je le trouverai. »

    Mais M. Larve était déjà loin, et tout en remontant la rue Darcet, il se disait :

    « Ce pauvre Coquille, tout de même... Dire que nous autres fonctionnaires, nous en arrivons tous là, dès qu’on nous a mis à la retraite !... Il n’y a pas à dire : il est complètement gâteux !... C’est ennuyeux, car je me plaisais chez lui, et Gudule, comme personne à Paris, savait accommoder le bœuf aux champignons ! »


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    Des jours passèrent. Larve s’ennuyait ferme, car, n’est-ce pas, quand depuis une quarantaine d’années on a l’habitude d’aller dîner au moins deux fois la semaine chez un ami, ce n’est pas du jour au lendemain que l’on se sèvre de cette saine joie. Et ce pauvre Larve, mettant les pouces, se préparait à s’en venir faire une visite à son ami Coquille, quand, un soir, il reçut ce mot triomphant :

    « Ai trouvé mon voleur ! Ce n’est pas Gudule. Que les dieux en soient loués. Viens dîner demain ! »

    « Ouf... » pensa M. Larve, et, le lendemain, à six heures et demie toquant, il se présentait chez son ami.

    Coquille n’était pas encore rentré, mais, dès l’antichambre, les narines de ce satané gourmand de Larve furent doucement chatouillées par une succulente odeur de bœuf aux champignons. Il ne put résister au désir de faire un tour de cuisine.

    « Eh bien ! Gudule, on a donc trouvé ce voleur ?...

    — Quel voleur ? dit le grenadier en jupon.

    — Mais celui qui volait le sucre !...

    À ces mots, la brave Gudule devint aussi rouge que les tomates qu’elle était en train d’éplucher. Et, naïve :

    — Comment !... Monsieur sait donc ?

    — Il paraît...

    — Ah !... Bonne mère !... Et moi qui lui voulais faire la surprise !

    — Quelle surprise ? demanda à son tour Larve stupéfait, et pensant soudain que le gâtisme du maître avait gagné la servante.

    — Ma foi, je puis bien tout vous dire, à cette heure, puisque M. Johanès sait tout... Vous savez comme il est regardant, d’une part, et d’autre part comme il aime les confitures d’oranges ! Alors j’ai pensé à lui en fabriquer quelques pots... Mais, si je lui avais demandé l’argent nécessaire pour le sucre, où aurait été la surprise ?... Alors, qu’est-ce que j’ai fait, moi... Tous les soirs j’ai mis de côté un morceau de sucre, un tout petit morceau de sucre, me disant qu’il n’y prêterait pas attention. Il y a de cela trois mois... pensez... cela m’a fait un bon kilo, et, justement, ce soir... »

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    Mais elle n’acheva pas. La porte de l’antichambre venait de s’ouvrir et M. Coquille apparaissait, criant :

    « Ce bon Larve !... Ah ! Que cela me fait plaisir de te voir !... Vite, à table !... Le dîner est-il prêt, Gudule ?... »

    Larve songeait :

    « Qu’est-ce qu’il me chantait dans son billet de ce matin, en m’annonçant que ce n’était pas Gudule qui volait le sucre... »

    Et il demanda :

    « Alors, ce voleur ?...

    — Chut !... Au dessert !... Ah... C’est une belle histoire... Quel flair, quelle intelligence il m’a fallu déployer !... Mon cher, enfoncés les M. Claude, les Roussignac et les Sherlock Holmes ! J’ai manqué ma vocation... J’aurais dû faire policier !

    — Il en est temps encore, répondit Larve qui, in petto se disait : ‘En voilà une affaire !... Si l’on ne dirait pas... J’en sais autant que lui, à cette heure, et je n’ai eu qu’à interroger Gudule !... Décidément, il est complètement gâteux !...’ »

    Cependant, Larve avait apprécié le potage Crécy; il redemanda trois fois du bœuf aux champignons, ce qui ne l’empêcha pas de reprendre du poulet, qui était délicieux. Et Gudule apporta de la confiture d’oranges. Mais, sans prendre garde que le pot ne portait pas l’ordinaire marque Dundee Marmelade, reculant sa chaise, les doigts dans les entournures de son gilet, Coquille commença :

    « Oui... mon vieux Larve... j’ai trouvé mon voleur !... Mais j’en ai eu du mal ! Je ne pouvais soupçonner Gudule, et je t’en ai donné les raisons. Alors, j’ai cherché ailleurs. Vois-tu, pour un policier, il faut de la méthode, de la logique et de l’esprit d’observation...


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    — Au fait !... Au fait !... cria Larve, que ce début commençait à agacer.

    — J’y arrive !... Mais il fallait bien te dire que ce que j’ai fait n’était point du tout à la portée de tous les esprits, et que toi-même...

    — Dis que je-suis un imbécile, grogna Larve.

    —Non ! Tu es un excellent comptable... Mais tu n’as pas comme moi l’âme d’un détective, là !

    — Enfin, continue...

    — Je te disais donc que ce n’était pas Gudule !.. Par conséquent, ce devait être forcément un autre !... Tu remarques la logique impeccable de mon raisonnement !... Un autre... oui... mais qui ?... Quelqu’un qui venait à la maison !... Mais qui y venait journellement.

    — Pardieu !

    — Tu dis pardieu... mais tu n’y aurais pas pensé, toi !...fit Coquille avec un regard de dédain pour son ami.

    — Non... Je suis un idiot, moi... repartit aigrement M. Larve.

    — Les personnes qui venaient ici journellement, Voilà donc le champ des recherches qui se rétrécit... Qui vient ici tous les jours ?... Trois personnes : la concierge, pour monter les lettres, la porteuse de pain et la crémière !... C’était donc une de ces trois personnes qui, logiquement, me volait mon sucre. Qu’est-ce que tu aurais fait, à ma place ?...

    Larve, à vrai dire, était ébahi. Si, tout à l’heure, dire, Gudule ne lui eût fait l’aveu de son quotidien larcin, je crois bien qu’il eût marché... Bien qu’il ne voulût pas en avoir l’air, son ami Coquille l’épatait ! Et cela se lisait sur sa physionomie si visiblement que Coquille s’en aperçut et, désormais, se sentant maître de son auditoire, il en profita pour écraser son ami de toute sa supériorité.

    —Tu n’aurais rien fait, toi, Larve, car tu n’as pas comme moi l’âme policière. Ou peut-être aurais-tu fait le guet ! Mauvais système ! Le véritable détective doit découvrir les coupables sans sortir de son cabinet de travail ! Seule la raison doit le guider... et j’ai raisonné !... La concierge n’a pas besoin de voler du sucre, elle gagne largement sa vie, son mari est mécanicien sur la ligne de l’État, ce sont des gens à leur aise !... La crémière est commerçante, comme tu sais ; en plus de son lait, elle vend quelques épices, du café, du thé, du chocolat et du sucre... Une femme qui vend du sucre ne s’amuse pas à en voler un morceau, chaque jour, chez ses clients... Restait donc la porteuse de pain... Une porteuse de pain n’a pas de mari mécanicien à l’ État, une porteuse de pain ne vend pas du sucre, une porteuse de pain est une femme dans la gêne... donc, c’était, ce ne pouvait être qu’elle, ma voleuse !... Il n’y avait pas l’ombre d’un doute... Par élimination, sans avoir besoin d’exercer la moindre surveillance, j’arrivais à cette conclusion, par la seule force du raisonnement.

    Larve sursauta :

    — J’espère que tu ne l’as pas fait coffrer ?...

    M. Coquille eut un sourire supérieur.

    — Larve, tu me fais de la peine...

    — Malheureux ! cria Larve. Mais tu ne sais pas...

    — C’était mon devoir, interrompit M. Coquille. Je suis allé trouver ses patrons... Et sais-tu ce que j’ai appris ?...

    — Non...

    — Eh bien, elle volait ses patrons, cette femme... On venait de l’arrêter !... Depuis une quinzaine de jours, deux agents de la Sûreté, et des meilleurs, à ce que je me suis laissé dire, étaient à ses trousses... Eh moi, Johanès Coquille, ancien chef de bureau à la Mairie du XVIIème, tout seul, sans aide, sans aucun des mille moyens dont dispose la police, par la seule force de ma logique, de ma méthode et de mon esprit d’observation, j’étais arrivé à dévoiler cette femme !...Qu’en dis-tu, Larve... N’est-ce pas étonnant ? N’ai-je pas le droit de me montrer fier ?...


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    À ce moment, Gudule, la brave Gudule, pénétra dans la salle à manger, et, tortillant le coin de son tablier bleu :

    — Comment Monsieur trouve-t-il les confitures d’oranges ?...

    — Mais, comme d’habitude, Gudule !...

    — C’est que je vais dire à Monsieur... »

    Mais Larve la regarda, et d’un coup d’œil lui rentra ses paroles dans la bouche. C’était un brave homme, dans le fond, que ce père Larve. D’ailleurs, bien qu’il connût le fin mot de l’histoire, le récit de son ami Coquille l’avait passionné, et il se disait :

    « C’est tout de même un malin, et si Gudule n’avait pas pris les morceaux de sucre pour ses confitures, sûrement, la voleuse eût été cette damnée porteuse de pain !... Alors, pourquoi le détromper ?... Il est si heureux !... »


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    Et le bon M. Coquille ne fut pas détrompé.


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