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Photo du rédacteurLucienne

Jacques et le haricot magique

... un conte traditionnel de Grande-Bretagne

Texte et illustrations dans le domaine public.


Jacques et le haricot magique


Il était une fois une veuve, dont le fils unique se nommait Jacques. Quoique très pauvre, elle aimait tellement son garçon, qu’elle le laissait paresser toute la journée et qu’elle lui passait toutes ses fantaisies. Aussi Jacques était-il devenu le plus grand polisson du village. Mais à mesure qu’il croissait en âge, il coûtait de plus en plus à sa mère ; bientôt elle se vit obligée de vendre peu à peu tout ce qu’il y avait dans sa pauvre demeure afin de subvenir à ses besoins.

Au bout de quelque temps, il ne lui restait plus qu’une vache, sa dernière ressource ; mais le pain manquant à la maison, il fallut se résoudre à s’en défaire. Elle dit alors à son fils d’aller vendre la vache à la foire. Jacques partit, et chemin faisant, il fit la rencontre d’un boucher qui portait dans son chapeau des haricots jolis et brillants. Jacques eut aussitôt envie de les avoir, afin de s’amuser avec. Voyant cela, le boucher, qui était un coquin, dit à l’enfant :

« Si tu veux me donner cette vilaine vache, je te fais cadeau de tous mes haricots !

— Volontiers » répondit Jacques, en sautant immédiatement sur les haricots.

Fier de cette belle emplette, il courut bien vite la montrer à sa mère. Pour la première fois de sa vie, la pauvre femme gronda son fils, et, dans sa colère, elle prit les haricots et les jeta par la fenêtre dans le jardin.


Jacques et le haricot magique

Hélas ! Il fallut se coucher sans souper, car il n’y avait pas de pain à la maison. Jacques, le cœur gros de larmes, comprenant sa faute, se mit au lit et s’endormit. Le lendemain, quand il s’éveilla, sa chambre était toute sombre ; à travers les volets, glissaient à peine quelques faibles rayons de soleil. Il courut à sa fenêtre, et vit que dans la nuit, les haricots avaient pris racine et qu’ils avaient monté, monté, monté,… à tel point que leurs têtes se perdaient dans les nuages. Les tiges s’étaient entrelacées, de façon qu’elles formaient une sorte d’échelle qui s’élevait jusqu’au ciel.

Jacques fut pris d’une envie folle d’y grimper. Il y mit un pied, puis l’autre ; enfin il escalada de son mieux les branches. Bientôt il dépassa les maisons, puis les arbres les plus élevés, ensuite les flèches des églises les plus hautes. Il montait, montait toujours. Ses forces commençaient à s’épuiser, lorsqu’il atteignit le ciel, et aperçut un pays inconnu.

Harassé de fatigue, il se laissa choir et s’endormit. Tout à coup, il lui sembla qu’il fendait l’air et il se trouva dans un beau jardin, couché sur un lit de mousse. Il venait à peine de jeter les yeux autour de lui, quand il vit venir une belle jeune fille vêtue d’une robe blanche comme le lys, et qui tenait à la main une baguette.


Jacques et le haricot magique

« Tu suivras, dit-elle, le chemin qui est tout droit devant toi, jusqu’à ce que tu rencontres la maison d’un géant. Ce géant est le meurtrier de ton père ; ton devoir est de le tuer ; tu confisqueras ensuite tous ses trésors et tu les rapporteras à ta pauvre mère. »

Quand elle eut achevé ces mots, elle disparut.

Jacques, aussitôt, se leva, et marchant droit devant lui, il arriva à une maison, à laquelle il frappa. Une femme vint lui ouvrir et lui cria :

« Fuyez, fuyez, pauvre enfant, avant que mon mari arrive ! Car s’il vous trouve ici, il vous dévorera.

— Hélas ! dit Jacques, je meurs de faim. Laissez-moi entrer et donnez-moi un morceau de pain. Vous me cacherez où vous voudrez, car il va faire nuit et je ne sais où aller.

La femme donna à Jacques de quoi manger, et déjà il sentait ses forces revenir, quand soudain elle s’écria :

— Voilà mon mari qui rentre ! »

Alors, elle poussa Jacques dans le four et referma la porte sur lui. Aussitôt, le géant entra, et, reniflant l’air autour de lui, il s’écria :

« Cela sent la chair fraîche !

— Oh ! lui répondit sa femme, ce que tu sens, c’est la peau des bœufs nouvellement écorchés.

Quand le géant eut dévoré son dîner, il hurla :

— Femme, apporte-moi ma poule afin que je m’amuse avec elle, avant d’aller me coucher. »

La femme apporta une poule et la posa sur la table. Chaque fois que le géant disait : « Poule, ponds un œuf », aussitôt la poule pondait un œuf d’or. Quand le géant eut le nombre d’œufs qu’il voulait, il s’endormit.


Jacques et le haricot magique

Aussitôt, Jacques se glissa hors de sa cachette, s’empara de la poule et regagna de toutes ses jambes la tige de haricots. Dégringoler le long des branches fut l’affaire de peu de temps. Il courut retrouver sa mère, à laquelle il donna la poule. Et quand la poule eut pondu quelques œufs d’or, Jacques alla les vendre, et avec le prix, il acheta une autre vache.

Mais Jacques se fatigua bien vite d’une existence aussi paisible : il déclara à sa mère qu’il voulait remonter là-haut. Sa mère eut beau protester, Jacques ne voulut pas l’écouter. Il se déguisa donc de son mieux, afin de n’être pas reconnu et grimpa le long de la tige de haricots. Arrivé dans le ciel, il alla tout droit chez le géant, frappa à la porte de la maison, et demanda l’hospitalité. La femme du géant vint lui ouvrir et avant que son mari rentrât, elle cacha Jacques dans le buffet. En arrivant, le monstre s’écria :

« Cela sent la chair fraîche !

— Ah ! dit la femme, c’est sans doute un morceau de viande que les corbeaux ont apporté sur le toit de notre maison. » Puis elle lui servit à souper.

Quand le géant eut bien mangé, il se fit apporter ses sacs d’or et s’amusa à compter et à empiler ses trésors ; après cela, il les remit dans les sacs et s’endormit. Jacques s’avança à petits pas, s’empara des sacs et fila vers la tige de haricots, le long de laquelle il descendit au plus vite, puis il alla trouver sa mère.


Jacques et le haricot magique

Il eût bien pu rester tranquille désormais, mais malgré les insistances de sa mère, il voulut remonter chez le géant. Il grimpa donc une troisième fois, et alla frapper à la porte du géant. La femme du monstre le cacha dans un chaudron.

Quand le géant eut dîné, il demanda sa harpe. Dès que la harpe fut posée sur la table, le géant lui dit : « Harpe, joue ! » Et la harpe, d’elle-même, rendit des sons harmonieux. À cette musique, le géant joignit bientôt ses ronflements. Alors, Jacques se saisit de la harpe et se sauva à toutes jambes. Mais la harpe cria : « Maître ! Maître ! » Le géant se leva d’un bond, et s’élança après Jacques. Heureusement, le monstre avait tellement mangé et bu que le garçon eut le temps d’arriver à la tige de haricots, et vous vous doutez qu’il ne mit pas longtemps à descendre !


Jacques et le haricot magique

Le géant descendit derrière lui. Apercevant sa mère tout en bas, Jacques lui cria : « Mère, apporte une hache ! ». Et, à peine à terre, Jacques se saisit de la hache et de toutes ses forces, il frappa sur les tiges de haricots. Bientôt, les tiges furent tranchées, et le géant, en tombant de si haut, se fracassa la tête et mourut.

De ce jour, Jacques et sa mère vécurent riches, heureux et honorés.


Jacques et le haricot magique

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