... un conte des frères Grimm
Texte intégral. Multiples illustrateurs.
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Illustration de couverture par Andrea Kowch
Un homme avait sept fils, mais pas encore de fille, bien qu’il en désirât toujours. Enfin il en vint une !
La joie fut grande, mais l’enfant était malingre et petite, et sa faiblesse décida les parents à la faire baptiser d’urgence. Le père envoya un de ses fils à la source chercher l’eau du baptême ; les six autres l’accompagnèrent et, comme chacun voulait être le premier à puiser, la cruche tomba dans la fontaine. Ils furent bien embarrassés et aucun n’osait rentrer à la maison. Ne les voyant pas revenir, le père s’impatienta :
« Ils se seront laissés distraire en jouant, et ont sûrement oublié, les méchants garçons !
En colère, et craignant que la petite ne meure sans avoir été baptisée, il s’écria :
— Je voudrais qu’ils soient tous changés en corbeaux ! »
À peine avait-il prononcé ces mots, qu’il entendit un bruit d’ailes au-dessus de sa tête, et qu’il vit sept corbeaux, noirs comme du charbon, volant tout autour de lui.
Les parents ne purent délivrer leurs fils de la malédiction et, malgré leur tristesse d’avoir perdu leurs sept garçons, ils se consolèrent un peu avec leur chère petite fille, qui ne tarda point à se fortifier et à devenir de jour en jour plus belle.
Elle fut longtemps avant d’apprendre qu’elle avait eu des frères, car ses parents se gardaient bien de parler des garçons ; mais un jour elle entendit des gens dire qu’elle avait beau être jolie, elle n’en était pas moins la cause du malheur de ses sept frères.
L’enfant fut très affligée. Elle alla trouver son père et sa mère et leur demanda si c’était vrai, et si l’on savait où se trouvaient ses frères. Les parents, ne pouvant plus cacher leur secret, dirent que telle avait été la volonté du ciel, et que sa naissance n’était que la cause innocente du malheur.
Mais la petite fille avait pris la chose à cœur, et pensait qu’elle devait délivrer ses frères. Elle quitta donc la maison en cachette et partit à leur recherche, afin de les libérer coûte que coûte. Elle n’emporta rien d’autre qu’une petite bague, souvenir de ses parents, une miche de pain pour la faim, une cruche d’eau pour la soif et une petite chaise pour la fatigue.
La fillette partit loin, bien loin, jusqu’au bout du monde et arriva près du soleil ; mais celui-ci était affreusement chaud, brûlant, et dévorait les enfants.
Elle s’en éloigna bien vite et courut jusqu’à la lune ; mais celle-ci était bien trop froide et terriblement méchante, car elle dit en voyant l’enfant : « Je sens, je sens de la chair humaine ! »
Alors la petite se sauva en toute hâte, et arriva parmi les étoiles. Elles lui furent favorables et bienveillantes. Chacune d’elles était assise sur une chaise qui lui appartenait. L’étoile du matin se leva et donna à l’enfant un petit os en lui disant :
« Sans ce petit os, tu ne pourras pas ouvrir la porte de la montagne de verre où habitent tes frères. »
L’enfant prit le petit os, l’enveloppa dans un bout d’étoffe, et reprit sa longue course pour arriver à la montagne de verre. La porte en était close et, quand elle voulut prendre le petit os, l’étoffe qui l’enveloppait était vide. Elle avait perdu le cadeau des gentilles étoiles ! Que faire alors ? Elle voulait sauver ses frères, mais n’avait pas la clef pour entrer dans la montagne. La brave petite fille prit un couteau et se coupa le petit doigt, le mit dans la serrure et eut le bonheur d’ouvrir la porte.
Dès qu’elle entra, un petit nain vint à sa rencontre en lui demandant :
« Que cherches-tu, mon enfant ?
— Je cherche mes frères, les sept corbeaux, répondit la petite fille.
Le nain lui dit :
— Ces messieurs les corbeaux ne sont pas là ; mais, si tu veux attendre jusqu’à ce qu’ils reviennent, tu peux entrer. »
Sur ce, le nain apporta la nourriture des corbeaux sur sept petites assiettes et dans sept petits gobelets.
Dans chaque assiette, la petite sœur mangea un petit morceau et dans chaque gobelet, elle but une petite gorgée. Au fond du dernier gobelet, elle déposa la petite bague qu’elle avait emportée. Elle entendit soudain un bruissement d’ailes et le petit nain lui dit :
« Voilà ces messieurs les corbeaux qui rentrent. »
C’étaient bien eux ; ils voulurent manger et boire et s’approchèrent de leurs petites assiettes et de leurs gobelets. Mais ils demandèrent l’un après l’autre :
« Qui a mangé dans mon assiette ? Qui a bu dans mon gobelet ? C’est une bouche humaine !
Et quand le septième eut épuisé sa coupe, la bague roula vers lui. Alors il reconnut l’anneau de leurs parents et s’écria:
— Dieu fasse que notre petite sœur soit ici, nous serions sauvés ! »
Quand la petite fille, qui écoutait derrière la porte, entendit ce vœu elle se montra aussitôt.
Alors les corbeaux retrouvèrent leur forme humaine.
Ils se caressèrent et s’embrassèrent les uns les autres et rentrèrent chez leurs parents, bien heureux.
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