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Saint François d'Assise et le loup de Gubbio

… adapté des Fioretti de Saint François d’Assise, chapitre 21

Le Roi Chat par Tohukiro Kawai

Le loup de Gubbio, par Luc Oliver Merson



Au temps où Saint François demeurait dans la ville de Gubbio, en Italie, parut un très grand loup, terrible et féroce, qui dévorait non seulement les animaux, mais aussi les hommes. De sorte que tous les habitants étaient dans une grande peur, parce qu’il s’approchait souvent de la ville. Tous allaient armés, comme s’ils allaient au combat ; et malgré cela, celui qui le rencontrait seul ne pouvait se défendre de lui. Par peur de ce loup, ils en vinrent au point que personne n’était assez hardi pour sortir hors de la ville.

C’est pourquoi Saint François, par compassion à l’égard de ces hommes, voulut affronter ce loup, bien que les habitants le lui déconseillassent tout à fait. Il prit donc le chemin du lieu où demeurait l’animal. Et voici que, devant beaucoup d’habitants venus voir ce miracle, le dit loup alla à sa rencontre, la gueule ouverte. Saint François, s’approchant de lui, lui parla ainsi :

« Frère Loup, je te commande de ne plus faire de mal ni à moi, ni à personne. »

Admirable à dire ! Aussitôt, le terrible loup vint paisiblement, comme un agneau, se coucher aux pieds du Saint.

Alors Saint François reprit :

« Frère Loup, tu fais beaucoup de dommages en ces endroits, et tu as commis de très grands méfaits, abîmant et mettant à mort les créatures de Dieu sans sa permission. Non seulement tu as tué et dévoré les bêtes, mais tu as même eu la hardiesse de tuer des hommes. Pour cela, tu mérites la fourche, en temps que voleur et assassin. Tout le monde murmure contre toi, et toute la contrée t’a en inimitié. Mais je veux, Frère Loup, faire la paix entre toi et ceux-ci : que tu ne les offenses plus, et qu’ils te pardonnent chaque offense passée. »

Ces paroles dites, le loup, par les mouvements de son corps, de sa queue et de ses oreilles, montrait qu’il comprenait ce que Saint François disait. Alors celui-ci ajouta :

« Frère Loup, puisqu’il me semble qu’il te plaît de faire et de tenir cette paix, je te promets de te faire donner toujours ce qu’il te faut, tant que tu vivras, par les hommes de cette ville. Ainsi, tu ne pâtiras plus de la faim, car je sais bien que c’est elle qui t’a fait commettre tout ce mal. Mais si je t’obtiens cette grâce, je veux, Frère Loup, que tu me promettes de ne plus jamais nuire à aucun homme, ni à aucun animal. Me promets-tu cela ?

Et le loup, en abaissant la tête, fit le signe évident qu’il promettait.

— Frère Loup, je veux que tu me fasses foi de cette promesse, afin que je puisse m’y fier. »

Et Saint François étendant la main pour recevoir le serment de la bête, le loup leva sa patte droite de devant, et la posa familièrement sur la paume du Saint.

Voyant cela, les habitants s’émerveillèrent. Et on ne sait comment, la nouvelle se répandit par toute la ville ; aussitôt, tout le monde, grands et petits, hommes et femmes, jeunes et vieux, se rassemblèrent sur la place centrale, pour voir le Saint rentrer en ville, en compagnie du loup.

« Écoutez mes frères, dit celui-ci, Frère Loup, qui se présente devant vous, m’a promis, - et il m’en a donné serment -, de faire la paix avec vous et de ne jamais plus vous offenser en rien. En échange, vous lui donnerez chaque jour ce qui lui est nécessaire. De mon côté, je me porte garant qu’il observera scrupuleusement ce pacte de paix. »

Alors le peuple, d’une seule voix, promit de toujours le nourrir. Saint François s’adressa alors au loup.

« Frère Loup, promets-tu d’observer l’accord de paix ? Tu n’offenseras plus ni les animaux, ni les hommes, ni aucune créature ? »

Le loup s’agenouilla alors, et par de doux mouvements du corps, du cou et des oreilles, montra, autant qu’il lui était possible, son désir d’observer chaque condition du pacte.

Le dit loup vécut ensuite deux années à Gubbio ; il entrait familièrement dans les maisons, sans faire de mal à personne et sans qu’il lui en soit fait. Il fut courtoisement nourri par les habitants ; et jamais aucun chien n’aboya après lui.


Finalement, après deux années, Frère Loup mourut de vieillesse. Ce dont les habitants eurent beaucoup de douleur ; car, le voir aller ainsi, paisible, par la ville, était un rappel constant de la sagesse et de la bonté, dont l’homme qui leur avait offert ce compagnon avait autrefois fait preuve.

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