top of page

    Le chien du riche et le pauvre homme, Henri Second

    Ce poème a été publié en septembre 1911, dans le magazine Lisez-moi bleu.


    Illustration d'Helen Allingham

    Tirant la langue, un chien mouton

    Qui courait quelque prétentaine,

    Regardait la borne fontaine,

    Sans pouvoir pousser le bouton.

     

    Auprès de lui passait la foule

    Ne voyant pas que ce toutou

    Était malheureux comme  tout

    D’attendre ainsi que l'onde coule.

     

    Pourtant, le chien était soigné ;

    C’était un superbe caniche,

    Tondu de frais et bien peigné ;

    Évidemment, un chien de riche.

     

    Survint alors un chemineau

    Très vieux, très laid, un peu loufoque,

    Vêtu d’une innommable loque

    À faire peur même au moineau.

     

    Le chien, vers lui, tourna la tête ;

    L’homme n’avait pas soif, pourtant

    Son pas lourd et comme hésitant

    Alla du côté de la bête.

     

    Et le pauvre diable aux abois,

    Pour qui la vie était si dure,

    Fit jaillir l’eau plus ou moins pure

    Et dit au caniche : « Allons, bois ! »

     

    L’animal but longtemps, à même,

    Puis regarda le vieux transi

    Dont souriait la face blême

    Et sembla lui sourire aussi.

     

    Il pensa que, dans la détresse

    Du vagabond sans pain ni sous,

    Rien ne pouvait être plus doux

    Et plus rare qu'une caresse.

     

    Voulant lui faire un peu de bien

    Et lui donner un brin de joie,

    Tout en lui prouvant qu’un bon chien

    N’est pas aussi dinde qu’une oie,

     

    Et qu’enfin son contentement

    N’était pas d’un ingrat, en somme :

    Le chien du riche, longuement,

    Lécha les deux mains du pauvre homme.

    Commentaires


    © 2022 par Lucienne - Livres en liberté -. Créé avec Wix.com

    bottom of page