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La visite des araignées


Illustration de couverture par Albert Chevallier Tayler

Illustration de couverture par Albert Chevallier Tayler



Je vais vous raconter quelque chose qui arriva à un arbre de Noël, il y a bien, bien longtemps, si longtemps, si longtemps, que j’ai oublié quand !

On était à la veille de Noël. L’arbre était déjà tout garni, avec des bougies, des lumignons scintillants, des oranges jaunes, des pommes rouges, des noix dorées et des joujoux. C’était vraiment un très bel arbre. Il était bien tranquille dans le grand salon, dont on avait fermé les portes, pour empêcher les enfants d’y entrer avant le lendemain. Mais, à part les enfants, tous les gens de la maison l’avaient admiré.

Minet aussi l’avait vu, avec ses gros yeux verts ; il avait tourné tout autour en regardant partout ; le brave chien de garde l’avait vu, avec ses bons yeux pleins de caresses ; le canari jaune l’avait bien regardé de ses petits yeux noirs, avant de s’endormir dans un coin de sa cage. Même les petites souris grises, qui avaient si peur du chat, étaient venues donner un coup d’œil à un moment où il n’y avait personne.

Mais il y avait pourtant des gens qui n’avaient pas vu l’arbre. C’étaient… les araignées !…

Vous savez, les araignées vivent dans les coins ensoleillés des greniers, et les coins sombres des caves. Et elles avaient bien compté venir voir le beau sapin, tout comme les autres personnes. Malheureusement, juste avant Noël, il y avait eu grand branle-bas de propreté dans la maison. Les servantes avaient couru dans tous les sens, balayant, cirant, frottant, époussetant, de la cave au grenier. Le balai passait dans les coins : pok, pok, et la tête de loup parcourait les plafonds : top, top ! Les araignées se sauvaient de tous les côtés. Personne ne pouvait rester dans la maison avec un pareil remue-ménage.

Cela fait qu’elles n’avaient pas pu voir l’arbre de Noël !

Les araignées aiment à savoir tout ce qui se passe, et à voir tout ce qui peut se voir ; aussi, elles se trouvèrent très ennuyées.

À la fin, elles se dirent : « Si nous allions auprès de l’enfant Jésus, peut-être pourrait-il arranger ça. » Elles allèrent donc jusqu’à lui, et lui dirent :

« Cher petit, tout le monde dans la maison a vu l’arbre de Noël, et demain les enfants le verront aussi ; mais nous, on ne nous laissera pas entrer, et nous ne l’aurons pas vu du tout ! Tu sais bien que nous ne quittons pas la maison, et que nous aimons beaucoup les jolies choses, et on nous a… nettoyées ! Nous ne pourrons pas le voir, pas du tout ! »

Le petit Jésus, eut pitié des araignées, et il leur permit d’aller voir l’arbre de Noël.

Le soir, quand tout le monde fut endormi, il les laissa toutes aller dans le grand salon.

Elles descendirent des greniers, tout doux, tout doux ; elles montèrent de la cave, tout doux, tout doux… Elles se glissèrent sous la porte, et entrèrent dans le grand salon. Les grosses mères araignées et les papas araignées, les grands-pères et les grands-mères, jusqu’aux toutes petites, jusqu’aux bébés araignées ! Elles coururent sur le plancher jusqu’au pied de l’arbre. Et alors, elles grimpèrent, tout doux, tout doux, le long des branches, jusqu’en haut ! Elles grimpaient et elles regardaient ! Elles étaient tellement contentes, et trouvaient l’arbre si joli !! En haut, en bas, au bout des branches et sur le tronc, sur les joujoux, sur les bougies, tout doux, tout doux, elles passèrent !

Elles restèrent là jusqu’à ce qu’elles eussent tout vu, et alors, elles retournèrent heureuses à la cave ou au grenier.

Et, comme la nuit de Noël était déjà très avancée, le petit Jésus descendit pour bénir l’arbre, et mettre les cadeaux dans la cheminée. Mais quand il arriva devant le sapin, qu’est-ce que vous pensez qu’il vit sur l’arbre ? Des toiles d’araignées !

Partout où les araignées avaient passé, elles avaient laissé leurs longs fils de soie, et vous savez qu’elles avaient passé partout !

C’était un spectacle bien étrange que celui de ces longs fils gris couvrant toutes les branches !

Qu’est-ce que le petit Jésus pouvait faire ? Il savait que les mamans n’aiment pas les toiles d’araignée. Oh ! Mais, pas du tout ! Un arbre de Noël tout couvert de toiles d’araignées, ça n’irait jamais !

Il réfléchit un instant, puis il toucha l’arbre de son petit doigt, et toutes les toiles d’araignées devinrent comme en or ! Elles brillaient, elles étincelaient au travers des branches, et les longs fils dorés pendaient de partout. C’était si joli !

Et c’est la raison pour laquelle, depuis ce temps-là, on met des fils d’or sur les arbres de Noël…

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